Eglise de La Ventrouze

Très belle église par ses proportions et la simplicité de son architecture, mise en valeur par le ton clair de la maçonnerie avec de gros moellons apparents. Une simple bordure de petits morceaux de vitraux colorés souligne le dessin des fenêtres de style Renaissance qui éclairent largement l’intérieur.

Cette église est sous le patronage de sainte Marie Madeleine dont la statue, gracieuse dans sa naïveté, à droite de l’autel, fait pendant à celle de la Vierge à l’Enfant de l’autre côté.

Rappelons-nous ce passage de l’Evangile de saint Luc :

“Jésus cheminait, prêchant et annonçant la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu.

Les douze apôtres étaient avec lui, ainsi que quelques femmes

qui avaient été guéries d’esprits mauvais et de maladies :

Marie appelée la Magdaléenne, de laquelle étaient sortis sept démons… ».

C’est elle qu’on retrouve suivant Jésus jusqu’au Calvaire et pleurant au pied de la croix. Avec la Vierge Marie et saint Jean, elle assiste à sa déposition et à sa mise au tombeau, comme on peut le voir sur la peinture, abîmée mais émouvante, encadrée sur le côté droit de l’église. Le lendemain du jour du sabbat, dès la première heure, elle y retourne apportant un vase de parfums pour l’embaumer selon le rite des Juifs. Elle voit le tombeau vide et court avertir les apôtres. C’est à elle que Jésus apparaît en premier lieu, dans le jardin.

Ainsi, Marie Madeleine est un témoin privilégié de la prédication du Christ, de sa mort et de sa résurrection. Sans doute entrait-il dans le plan divin de la Rédemption que notre humanité s’y trouve représentée sous la figure d’une pécheresse repentie, avec sa sensibilité de femme, son amour et sa foi.
Ne sommes-nous pas tous pécheurs, et tous appelés au Salut par le Christ ?
Souvent assimilée à tort à Marie, soeur de Marthe et de Lazare, Marie Madeleine a inspiré beaucoup de récits légendaires qui ont alimenté la dévotion populaire. On s’est plu aussi à la représenter comme une personnification du pardon des péchés et de la pénitence. Quoi qu’il en soit, son image reflète pour nous la lumière du matin de Pâques.
Des poutres taillées en forme de fuseaux soutiennent la voûte en bois de la nef, séparée du choeur par un arc de pierre, suivant une disposition fréquente dans la région. Elle est encadrée ici, de chaque côté, par des petites chapelles, dont l’angle est percé d’une ouverture ménageant la vue vers le choeur ; elles conservent des autels à baldaquins incurvés et finement ajourés, de bois peint du XVl°s. Dans celle de droite, plusieurs jolies statues anciennes : saint Yves en costume d’avocat (La Ventrouze était autrefois le siège d’une justice seigneuriale) ; saint Gilles protégeant une jeune biche venue se réfugier dans son ermitage (sans doute en relation avec l’ancien prieuré de Saint-Gilles situé en forêt du Perche) ; et sur l’autel un jeune abbé tête nue, tenant une crosse ; enfin, un Christ de pitié, les mains liées et coiffé de la couronne d’épines, oeuvre du XVI°s., d’une expression émouvante. On admirera aussi, replacée dans la nef, la statue en pierre de sainte Barbe, drapée dans son ample manteau bleu et rouge, et qui devait porter autrefois une petite tour et la palme du martyre.
Sur le mur on peut déchiffrer l’inscription funéraire (1550) d’un ancien curé :
Souks ce tombeau par le droict de nature Gist le corps de maistre Jeha Mannourv Qui de ce lieu avait la prélature Et a les siens en bonnes méurs noury Il deceda dont chascun fui mary
Au moys de mars l’an M. V. ’cent’ cinquâte Sy le corps est en terre poury
L’arme n’en doult (1) mais est es ciels vivote.

(1) du latin dolerc : souffrir. L’âme n’en souffre pas mais est vivante dans les cieux.Retour ligne automatique
D’autres inscriptions plus récentes rappellent les noms de courageux pionniers partis s’établir au Canada : Guillaume Landry en 1645, Jacques Le Houx en 1647, Robert Gagnon en 1655. Natifs de La Ventrouze, ils avaient été baptisés sur la double cuve baptismale de pierre taillée à gauche de l’entrée de cette église, qui marque la continuité de la vie de la paroisse.